Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
12 décembre 2009 6 12 /12 /décembre /2009 08:56

 

Bras de fer ou profil bas

 

Par Soufiane BEN FARHAT

 

Israël sait l’Europe faible. Diplomatiquement s’entend. L’irruption même d’Israël sur la scène moyen-orientale, puis mondiale, a coïncidé avec le déclin planétaire de l’Europe occidentale.

Un acteur et témoin aux premières loges à l’époque l’a si bien résumé : "Dès la première moitié du siècle, la France et l’Angleterre, épuisées par deux guerres mondiales, assisteront à l’effondrement de leur empire et de leur autorité, dans cet immense bouleversement qui succède à leur victoire. La division qui règne parmi les puissances européennes fera perdre à la France et à l’Angleterre, coup sur coup, et dans un enchaînement in��luctable, leurs principales positions en Afrique, en Asie, aux Indes, en Indochine, en Afrique du Sud et en Afrique du Nord…Et désormais, dans le monde, deux autres voix se font entendre, deux hommes se dressent l’un en face de l’autre : le président des Etats-Unis contre le premier soviétique…Dès lors, la France ne joue plus que le rôle de brillant second" (Georges Bonnet, Le Quai d’Orsay sous trois républiques. éd. Fayard, Paris, 1961, p. 519).

Le processus se vérifie au fil des décennies explosives du Proche-Orient en crise. Ses ravageuses guerres cycliques tous les sept à dix ans corroborent la stature militaire et diplomatique faible d’une Europe incapable ne fut-ce que de formuler une politique extérieure commune. Sur le conflit israélo-palestinien et israélo-arabe, les Etats européens affichent par moments des positions diamétralement opposées. Israël campe dès lors la posture des néoconservateurs américains qui mettent un point d’honneur à parler de la "Vieille Europe".

Et Israël ne s’embarrasse guère de rétorsions immédiates à l’encontre de l’Europe à l’occasion du moindre son de cloche diplomatique jugé discordant par Tel-Aviv. Ainsi, pas plus tard qu’avant-hier, le Parlement européen a-t-il indiqué avoir demandé des explications aux autorités israéliennes, qui ont empêché une délégation de députés européens de se rendre dans la bande de Gaza. Israël avait accordé la veille une autorisation à tous les membres de la délégation. Trois heures plus tard, l’entrée a été annulée "pour des raisons de sécurité", sans plus d’explication", selon un communiqué du Parlement européen transmis par le bureau de l’Union européenne à Al Qods (Jérusalem).

"Il est très curieux, précise le communiqué du Parlement européen, que l’annulation soit intervenue quelques heures après l’annonce de la déclaration du Conseil de l’Union européenne réaffirmant la position forte de l’Europe en faveur d’un Etat palestinien basé sur les frontières de 1967 et de la fin des implantations en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est".

Réunis à Bruxelles le 8 décembre, les ministres des Affaires étrangères des Vingt-Sept ont renouvelé les principes défendus par les Européens au Proche-Orient par la présidence suédoise de l’UE. Leur Déclaration commune est catégorique : "S’il doit y avoir une paix véritable, une solution doit être trouvée à travers des négociations pour résoudre le statut de Jérusalem comme la future capitale de deux Etats". En même temps, les Européens se disent profondément préoccupés par la situation à Al Qods-Est. Rappelant qu’ils n’ont jamais reconnu l’annexion de la partie orientale de la ville sainte, ils appellent le gouvernement israélien à "cesser les traitements discriminatoires à l’égard des Palestiniens de Jérusalem-Est".

Une semaine après l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, la position de principe européenne se veut un signal fort. L’objectif de la présidence suédoise de l’UE est double et combiné : relancer le processus de paix au Proche-Orient et promouvoir haut et fort une ambitieuse diplomatie européenne commune.

Cela tombe à point. L’UE vient en effet de se doter d’un nouveau Haut représentant pour la politique étrangère, Catherine Ashton. Aux dernières nouvelles, elle a été propulsée à la tête d’un service d’action diplomatique ayant pour ainsi dire les moyens de sa politique, via une puissance de frappe financière. Sa mission première consiste à donner un visage à la diplomatie européenne agissante sur la scène internationale. D’ailleurs, dès janvier 2010, Catherine Ashton présidera les réunions des ministres européens des Affaires étrangères.

Reste à savoir si les Israéliens et les Américains l’entendent de cette oreille. Sinon partout dans le monde, du moins dans le "pré carré" proche-oriental.

Les immédiates mesures de rétorsion diplomatique israéliennes semblent, à ce stade, un mini-test. L’Europe relèvera-t-elle le défi jusqu’au bout, au prix d’un bras de fer diplomatique au besoin? Ou bien se débinera-t-elle et adoptera-t-elle un profil bas, encore une fois, face aux pressions israéliennes et des puissants lobbies pro-israéliens ? Se contentera-t-elle tout au plus de jouer le rôle de brillant second? On verra bien sous peu…

 S.B.F.



http://www.lapresse.tn/.....


Les articles et autres textes publiés ne reflètent pas  obligatoirement les opinions de l'association "Comité Justice et Paix en Palestine et au Proche-Orient du 5ème (CJPP5)", qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles et autres textes, le nom du site et/ou du journal, ainsi que celui des traducteurs.

Partager cet article
Repost0

commentaires

H
<br /> Chère madame S.B.F.<br /> <br /> Je voudrais partager cet optimisme à l'égard de l'instauratuon du ministère des AE de l'Europe. Mais le choix de cette personne, Mme Ashton, inconnue pour ceux qui restent lointains des affaires du<br /> PO, semble pipé. De par son entourage, ne va t-elle pas subir toutes les pressions pour neutraliser le potentiel diplomatique européen, dont les parties nationales, ministres nationaux (Kouchner en<br /> France), présidents des commissions parlementaires nationales (Lellouche en France), ont toujours été en général plutôt favorable à Israël.<br /> Voici un message espagnol qui mérite de poser la question au sujet de madame Ashton :<br /> La belle avancée européenne sur Jérusalem Double-Capitale, la plus belle et généreuse idée pour le XXI° siècle, aussitôt avancée, se retrouve minée elle aussi sous l'influence rampante d'un<br /> Kouchner partisan.<br /> Une nouvelle percée interviendra sans tarder avec Mme Ashton, dont le mari Keppler semble proche lui aussi des choix israéliens.<br /> N'est ce pas d'ailleurs la raison plus ou moins rampante de la nomination doublement curieuse d'une britannique-atlantiste d'une part, épouse d'un personnage, spécialiste de l'enquête, du panel, et<br /> du renseignement ( voici le site YouGov : http://www.yougov.com/frontpage/home ), professionnellement très lié, semble-t-il, au Proche Orient notamment.<br /> Voici le commentaire espagnol que, Le 10/12/09, j'ai déjà transmis à :<br /> http://bruxelles2.over-blog.com/article-la-baroness-catherine-ashton-future-haut-representant--39679677.html<br /> <br /> Ce message espagnol provient du site Debate Europe :: View topic - Por una Europa Mejor<br /> <br /> <br />
Répondre